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jeudi 25 septembre 2008

PUTAIN D’USINE (JEAN-PIERRE LEVARAY, EFIX, 2007)



La genèse de cette BD est particulière, puisqu’elle est l’adaptation du roman éponyme de Jean-Pierre Levaray, qui l’avait écrit pour exorciser ses propres démons, étant lui-même ouvrier de fabrication depuis 30 ans. Le roman publié en 2002 racontait ses mésaventures et plus généralement la difficile condition de salarié, avec tout ce qu’elle a de monotone et de répétitif. C’est lors d’une manifestation littéraire que Jean-Pierre Levaray fait une rencontre déterminante en la personne d’Olivier Petit, qui lui propose de transposer l’action du roman dans les cases d’une BD. Olivier Petit cherche la personne idéale parmi ses dessinateurs, et c’est à partir de là qu’Efix va rencontrer Levaray.
Les deux hommes semblent sur la même longueur d’ondes, et le projet peut être lancé. La production a pris plusieurs années, Efix testant plusieurs styles avant d’opter pour un noir et blanc cru collant parfaitement à l’ambiance que souhaite donner Levaray.


Putain d’Usine est un récit à la fois très personnel, mais il revêt également un caractère universel évident. Tous ceux qui sont passés par les chaînes de production, que ce soit en job d’été ou en tant que salarié, retrouveront l’atmosphère oppressante de ces immenses ventres noirs qui engloutissent les hommes pour les relâcher après les avoir essorés pendant des heures. C’est au concept même de taylorisme que l’auteur s’attaque, celui qui vous réduit à l’état de machine pendant toute une vie, un simple rouage destiné à assouvir les besoins d’une production exponentielle et infernale.
L’usine, c’est l’enfer, dans lequel les ouvriers tentent de se serrer les coudes comme ils peuvent, et où le danger guette à chaque coin. La visualisation que fait Efix des cauchemars de Levaray est très réussie, et les peurs nocturnes rejoignent celles qui nous happaient durant notre enfance. La peur du noir, la peur de ce qui se cache dans cette immensité , tout cela est très bien rendu par un graphisme fort et une atmosphère tranchée.


Le découpage est composé de nombreuses séquences courtes, allant de la grève à l’apéro, en passant par l’angoisse d’aller au travail, les accidents, etc… Levaray fait un tour complet de ce qui se passe dans une usine, mettant en évidence le conditionnement qu’elle a sur les individus, tant d’un point de vue individuel que social. L’usine esquinte, que ce soit à cause des produits toxiques, des presses destructrices ou de la déchéance de l’esprit humain qu’elle provoque.
Levaray prend bien sûr position pour les ouvriers qui se trouvent tout en bas de l’échelle, et il est vrai que le combat mené contre le patronat est bien manichéen. Mais même si cet aspect-là semble parfois exagéré, il tient bien compte du ressenti des ouvriers, et il souligne bien les multiples problèmes auxquels ils sont confrontés chaque jour, que ce soit en période de négociations salariales ou de délocalisations. La période est très dure, et c’est toujours les plus petits qui trinquent en premier. De ce point de vue, il est aisé de comprendre les ressentiments de Jean-Pierre Levaray.
Mais la force de ce bouquin, c’est que tout ces aspects négatifs sont expliqués avec beaucoup de philosophie, et l’auteur parvient à déceler de la beauté même dans cet enfer.

mercredi 24 septembre 2008

TWIN PEAKS (MARK FROST, DAVID LYNCH, 1990)




C’est en 1990 que cette série qui allait marquer l’histoire télévisuelle débarque sur le petit écran. C’est juste après Sailor et Lula que David Lynch tente l’aventure feuilletonesque avec la complicité de Mark Frost.
Résolument hors norme, cette série est d’une intelligence rare et bénéficie d’une ambiance particulière et totalement atypique. L’immersion dans la ville de Twin Peaks nichée à flanc de montagne dans le nord américain est immédiate et irréversible. L’écriture à 4 mains de Frost et Lynch est d’une limpidité et d’une complexité géniales, offrant au spectateur des dizaines de personnages denses et uniques qui vont s’entrecroiser le temps de 2 saisons et 29 épisodes.
Le leitmotiv de Twin Peaks va être l’enquête sur la mort de Laura Palmer, figure emblématique et puissante qui marque les lieux de son aura mystérieuse. Tantôt fuyante, tantôt légèrement dévoilée, Laura Palmer est à la fois le nœud de l’intrigue et celle qui va relier tous ces personnages étranges dans un maelström d’intrigues secondaires. Sa mort lui donne une dimension mythique, et les découvertes progressives sur sa vie ne vont faire qu’accentuer cette impression.


Pour venir à bout de cette enquête, un inspecteur du FBI est dépêché sur les lieux, et quel inspecteur! Il s’agit de Dale Cooper, personnage complètement iconoclaste et pourvu d’un sens du détail qui ferait passer Sherlock Holmes pour un gamin attardé! Personnifié par un Kyle MacLachlan flirtant avec le génie, l’agent Cooper est un personnage fascinant et imprévisible, et il va rapidement être à l’aise dans cette ville si particulière…
Le travail de Frost et Lynch ne repose pas uniquement sur les personnages et les intrigues multiples, mais il se fait aussi au niveau de l’atmosphère intense qui plane sur cette ville. Twin Peaks est une vieille ville plantée en plein milieu de la nature, et sa position même lui donne des airs presque fantastiques. Les visions crépusculaires de cette ville touchent littéralement à l’inconscient (procédé déjà éprouvé par Lynch sur Eraserhead, et finalement dans tous ses films!), et les émotions qu’elles procurent sont d’une intensité rare. Les plans d’un carrefour désert, la caméra qui s’attarde sur les boiseries de l’hôtel, le lent panoramique sur la cascade locale… Tout semble sorti tout droit d'une rêverie étrange, et la conception même de cette histoire semble issue d’une autre réalité. A aucun moment on ne sent l’auteur qui écrit son récit, mais chaque geste, chaque parole, chaque situation surgit avec une vie qui lui est propre. C’est vraiment unique, et les épisodes se suivent avec un intérêt qui ne se dément jamais.


La galerie de personnages recoupe des femmes bafouées, des parents endeuillés, des liaisons secrètes, des manipulations… Le calme qui existe à Twin Peaks est fragile, et cache quelque chose de sourd et opaque, une chape de mystère dans laquelle les habitants évoluent sans le savoir. Comme si les lieux étaient plus forts que leurs propres volontés, et que tous ces destins ne pouvaient exister qu’ici…
Avec un pilote et 8 épisodes, Mark Frost et David Lynch entament une aventure passionnante qui se poursuivra dans une ultime saison constituée de 21 épisodes. Une disposition bancale, mais en adéquation totale avec le ton de la série et ses intrigues surprenantes. Il est très rare qu’une série aussi courte marque autant les esprits, mais si vous n’avez jamais mis les pieds dans cette petite ville si tranquille, je vous conseille de vous y rendre sans plus attendre, vous allez vite comprendre ce qu’elle a d’adictif!

LA PORN DEMO DE RAMOU RAMIREZ (SHYSTRAK 1/2, 2008)



Ramou Ramirez est une sex star élevée dès son plus jeune âge au sein de Brigitte Lahaie et des écuries Marc Dorcel. Sa passion pour la bonne chair s’est installée tout naturellement, au gré de ses premiers émois et de ses nombreuses aventures… Ramou Ramirez est une icône de la porn attitude actuelle, et il nous fait aujourd’hui l’insigne honneur de nous dévoiler sa fameuse porn démo tant attendue, où il va nous livrer quelques-uns des secrets de son succès…
Nous suivons donc ses échauffements, ses prises de position parfois risquées et surtout, nous sommes face à un homme qui aime son métier et qui aime partager sa passion. Ramou donne de sa personne sans compter, et c’est ce qui fait le charme de cet acteur que l’on croyait inaccessible. Mais attention, cela ne signifie pas qu’il acceptera de coucher avec vous sans réfléchir! Ramou a un corps, mais il a aussi un cœur bien monté…
Je vous conseille donc vivement d’aller sur Airmole blog consulter cette vidéo bien délirante signée Shystrak 1/2 pour le collectif Kuryakin. Mais prévoyez quand même des mouchoirs propres!


http://www.airmole-blog.com/

mardi 23 septembre 2008

NOUS PENSONS POUR VOUS (PIERRE TROESTLER, 2008)




Le cinéma local se porte plutôt bien dans la région mulhousienne, la preuve avec ce court métrage signé Pierre Troestler qui déroule un récit dramatique et inquiétant. Tourné sous la double bannière de La Compagnie des Foulosophes et des Productions Atmosphère, ce film de 7 minutes suit la déprime d’un homme se retrouvant seul après le départ de sa femme. Mais là où on aurait pu s’attendre à un énième film lacrymal qui se contenterait de filmer la douleur (procédé très apprécié des films dits d’auteur…), Pierre Troestler opère un virage progressif vers une atmosphère plus étrange…
Je ne vous en dirai pas plus sur le récit, mais il faut également noter l’attention portée à la réalisation; le choix des cadrages désaxés n’est pas fait arbitrairement comme on le voit souvent pour donner un côté fun, mais il s’agit ici d’une véritable volonté de dramatisation qui découpe les personnages pour créer une réelle inquiétude. La situation dérive vers l’inconnu avec un personnage particulier, et la mise en scène souligne ce glissement inquiétant en filmant la personne de part en part, utilisant des inserts (la bouche, la main, etc…), comme pour signifier la complexité d’un homme dont on ne connaît pas les motivations profondes.


Nous pensons pour vous est une petite réussite formelle et narrative, qui augure de la bonne vitalité du cinéma artisanal. Le casting composé de Jean-Philippe Aurore dans le rôle principal et de Pierre Troestler himself dans celui d’un gars bien étrange donne cette dimension de menace sourde qui plane sur le film. Le reste du casting est composé de Stéphanie Vinh, Pamela Ritter, Emilie Rivière, Eric Simon, Paulette Troestler et du petit Pierre Bao Troestler! D’ailleurs il n’y a pas que le réalisateur qui multiplie les casquettes, puisque Eric Simon est aussi le cadreur et le monteur du film! Et enfin, Anne Motteau est l’ingénieur du son de ce court métrage. N’hésitez pas à aller faire un tour sur le blog de l'auteur!